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humain ne contient rien en for de corporel, nous n'nfous pas ueant- moins ajfnrer que la poij'ée ne piiiffe en aucune façon conuenir au corps agité par defecrets niouueniens. Car, voyant qu'il y a certains corps qui ne penfent point, & d'autres qui penfent, comme ceux des hommes & peut-eflre des befîes, ne pajjerions-nous pas auprès de vous pour des fophifîes, & ne nous accuferie--7'ous pas de trop de témérité, fi, nonobflant cela, nous roulions conclure qu'il n'y a aucun corps qui penfe ? Nous auons mefme de la peine à ne pas croire que vous aurie\ eu raifon devons moquer de nous, fi nous eufjions les pre- miers forgé cet ai-gutnent qui parle des idées, & dont vous vous fér- ue^ pour la prenne d'vn Dieu & de la diftinâion réelle de l'efprit d'anec le corps, & que vous l'euf]ie\ enfnite fait pajj'er par l'examen

354 \de voftre analyfe. Il efl vray que vous paroif]'e\ en eflre fi fort pre- uenu& préoccupé, qu'il femble que vous vous foye^ vous-mefme mis vn voile deuant l'efprit, qui vous empefche de voir que toutes les opérations 6' propriété- de lame, que vous remarque^ efire en vous, dépendent purement des mouuemens du corps; ou bien défaites le nœud qui, félon voftre ingénient, tient nos efprits enchainei, & les empêche de s'éleuer an dejj'us du corps.

\Le nœud que nous trouuons en cecy eft que nous comprenons fort bien que 2 & 3 ioins enfemble font le nombre de 5, & que, fi de chofes égales on ofie chofes égales, les refies feront égaux : nous sommes conuaincus par ces verite- & par mille autres, aujji bien que vous; pourquoy donc ne fommes-nous pas pareillement conuaincus par le moyen de vos idées, ou mefme par les nofires, que l'ame de l'homme cfi' réellement difiinâe du corps, & que Dieu exifie? Vous dire^peut- efire que vous ne pouue\ pas nous mettre cette vérité dans l'efprit, fi nous ne méditons auec vous ; mais nous auons à vous répondre que nous auons leu plus de fept fois vos Méditations auec vne attention d'efprit prefque femblable à celle des Anges, & que neantmoins nous ne fommes pas encore perfiade^. Nous ne pointons pas toutesfois nous perfuader que vous veuillie\ dire que, tous tant que nous fommes, nous auons l'efprit fiupide & grofjier comme des befies, & du tout

355 inhabile pour les chofes metaphyfiques, \ aufquelles il y a trente ans que nous nous exerçons, plutofi que de confeffer que les raifous que vous flwe^ tirées des idées de Dieu & de l'efprit, ne font pas d'vn

fi grand poids & d'vne telle autorité, que les hommes fçauans, qui tâchent, autant qu'ils peuuent, d'élcuer leur efprit au defius de la matière, s'y puijjént & s'y doiuent entièrement fonmettre.

Au contraire, nous cfiimons que vous confefferei le mefme auec nous, //" jous voule- vous donner la peine de relire vos Méditations