Page:Mind (Old Series) Volume 9.djvu/224

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212 ALFRED BINET : LA BEATIFICATION c'est un commencement, un debut. C'est la loi que tout etat de conscience tend a se depenser en mouvement, que toute operation de la pensee a pour but 1'action. Consideree a ce point de vue, la perception externe est la premiere partie d'un acte moteur, qui a le caractere d'une adaptation de 1'individu a son milieu; et 1'illusion des sens, qui est une perception fausse, est la premiere partie d'un acte d'adapta- tion mal concu, rnal dirige, avorte. II en resulte que la correction d'une illusion des sens, par la modification qu'elle apporte dans les actes de 1'individu, produit un phenomene d'arret. On va faire un faux pas, sous la pression d'une illusion de la vue ; si avec la canne on rectifie 1'illusion avant qu'elle ne passe a 1'acte, le faux pas est evite ; la sensation reue par 1'iiitermediaire de la canne, en supprimant la representa- tion fausse, en supprime du meme coup 1'effet moteur ; elle empeche done, par voie indirecte, un mouvement qui allait se produire ; il y a bien la un phenomene d'arret. Seule- ment 1'arret a lieu plus tot que dans le cas ou Ton reprime un mouvement par un acte de volonte ; le processus psycho- moteur est suspendu dans sa pbase psychique, au lieu d'etre suspendu dans sa phase motrice ; c'est pour cette raison seule que 1'arret a la forme d'une negation, c'est a dire d'un phenomene intellectuel, au lieu de consister dans le pheuo- mene moteur d'une suspension de mouvement. L'analogie s'etend encore plus loin. M. Bibot a tres bien montre que le pouvoir volontaire d'arret n'est pas un fait primitif, mais un etafc de formation secondaire ; on peut en dire autant du pouvoir de controler le resultat de la percep- tion externe ; ce sont la des appareils de perfectionnement surajoutes. Dans sa forme primitive, 1'intelligence n'est que force impulsive ; 1'etude des petits enfants, des sauvages et des animaux montre avec quelle rapidite et quelle fatalite chaque combinaison de la pensee se traduit en acte. II y a dans ces natures primitives un besoin irresistible de croire qui est correlatif au besoin d'agir. A ce moment, le reflexe est veritablement le type de la vie de relation. Mais 1'organisme intellectuel se perfectionne avec le temps, et le perfectionnement ne consiste pas seulement dans une complication superieure de 1'appareil deja existant, mais en- core dans une formation absolument nouvelle, le pouvoir de coordination et d'arret. II faut bien con9evoir que cette ac- quisition se fait dans deux sens a la fois, dans 1'ordre de la connaissance et dans 1'ordre de 1'action ; 1'individu acquiert en meme temps le pouvoir de ralentir, de suspendre, de coordonner ses mouvements et de les faire converger vers