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2 20 OEuVRES DE DeSCARTES. 4>5-4'6.

en aiioil vu gui exiftaj}. Et de fait, il nie qu'on luy puijfe iaviais rien obieâer qui lui cau/e le moindre doute; car que hiy obieâere\-vous? que, s'il y a m Dieu, il le peut deceuoir? mais il l'ous fou tiendra

346 qu'il n'ejl pas pojjible qu'il puijfe \ iamais e^ftre en cela deceu, quand me/me Dieu y employeroil toute fa puijfance.

De ce fcrupule en naijl vn cinquième, qui prend fa force de celte déception que vous voule^ dénier entièrement à Dieu. Car, fi pluficurs Théologiens font dans ce fenliment, que les damne-, tant les anges que les hommes, font continuellement deceus par l'idée que Dieu leur a imprimée d'vnfeu déuoranl, en forte qu'ils crojent fermement, & s'imaginent voir & rejfentir ejfeâiuement, qu'ils font tourmente^ par vn feu qui les confomme, quoj qu'en effeâ il n'y en ait point, Dieu ne peut-il pas nous deceuoir par de femblables efpeces, & nous impofer continuellement, imprimant Jans cejfe dans nos âmes de ces faujfes £' trompeufes idées? en forte que nous penfions voir tres-dairetnent, 6'- loucher de chacun de nosfens, des chofes qui toutesfois ne font rien hors de nous, eflant véritable qu'il n'y a point de ciel, point d'afîres, point de terre, & que nous n'auons point de bras, point de pieds, point d'yeux, &c. Et certes, quand il en vferoit ainfî, il ne pouroit eflre blâmé d'iniuftice, & nous n'aurions aucun fujet de nous plaindre de luy, puifqu'eflant le fouuerain Seigneur de toutes chofes, il peut difpofer de tout comme il luy plaifi ; veu principalement qu'il femble auoir droit de le faire, pour abaijfer l'arrogance des hommes, châtier leurs crimes, ou punir le péché de leur premier père, ou pour d'autres

347 raifons qui nous font inconnues. Et \ de vray, il femble que cela fe confirme par ces lieux de l'Efcriture, qui pronuent que l'homme ne peut rien fçauoir, comme il paroi ft par ce texte de l'ApoJire à la pre- mière aux Corinth., chapitre 8, verfet 2 : Quiconque ertime fçauoir quelque choie, | ne connoiftpas encore ce qu'il doit Içauoir ny com- ment il doit fçauoir; & par celuy de l'Ecclefiafle, chapitre S, verfet ij : l'ay reconnu que, de tous les ouurages de Dieu qui fe font fouz le Soleil, l'homme n'en peut rendre aucune raifon, & que, plus il s'efforcera d'en trouuer, d'autant moins il en trouuera; mefnies s'il dit en fçauoir quelques- vncs, il ne les poura trouuer. Or, que le Sage ait dit cela pour des laifons mcurement couftdcrécs, & non point à la hâte dî-fansy auoir bien p(^nfé, cela fe void par le conlciiii de tout le Liure, & principalement oii il traille la quejlion de l'ame, que vous foulene- eflre immortelle. Car, au chap. 3, veifet i <j , il dit : Que

l'homme & la iument paflent de mefme façon; d' afin que vous ne difie\ pas que cela fe doit entendre feulement du corps, il adioute, vn peu après, que l'homme n'a rien de plus que la iument ; «S- venant à