Traité d’Escrime équestre

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Éditions de la Revue Olympique (p. 3-8).

TRAITÉ D’ESCRIME ÉQUESTRE


Préambule

L’escrime équestre est un sport à la portée de tous, à la condition de le pratiquer entre deux adversaires chevauchant côte à côte, ce qui permet : 1o de marcher aux trois allures à volonté. — 2o de maintenir les chevaux calmes. — 3o de rendre les contacts durables.

Ainsi entendue, l’escrime équestre a un double avantage. Elle procure à celui qui s’y adonne une gymnastique virile et passionnante, très propre à assouplir le corps et à développer la hardiesse, le coup d’œil et le sang froid ; d’autre part, elle perfectionne rapidement les talents du cavalier en lui permettant d’acquérir de l’assiette et en évitant que son attention ne se concentre exclusivement sur sa monture comme il arrive trop souvent.

L’escrime équestre se pratique sous deux formes : avec le sabre et avec le poing (boxe). C’est un exercice de manège auquel il ne conviendrait de se livrer en plein air que sur un terrain égal et soigneusement reconnu au préalable.

Escrime du sabre

Armes et montures.

L’arme doit être un sabre d’escrime en métal, de l’espèce appelée sabre lourd. Le sabre en bois et aussi le sabre léger dont l’usage prédomine maintenant pour l’escrime à pied sont des armes défectueuses et dangereuses à manier par un cavalier.

La plupart des chevaux sont aptes à être utilisés pour l’escrime équestre. Un cheval vif s’accoutume presque aussi rapidement qu’un autre, les premières passes se faisant nécessairement au pas. L’important pour le cavalier est que son cheval obéisse bien à la pression des jambes et qu’il ait des allures régulières et suivies.

Équipement.

Le meilleur équipement consiste en : une culotte de drap épais avec des bottes ou des jambières de cuir, une chemise de flanelle et une veste d’escrime tout entière en forte toile de façon que le dos, la poitrine et les avant-bras soient bien protégés mais sans aucun rembourrage. Le col montera sur la nuque pour la garantir. Les gants de fleuret ordinaire peuvent être employés mais, à cause de l’usure rapide produite par les rênes, il est préférable de les avoir doublés à l’intérieur et entre les doigts en peau résistante. Les gants d’épée sont insuffisamment rembourrés. Le masque doit être un masque d’escrime solide auquel on adapte un épais bourrelet de cuir rembourré et qu’une courroie légère ajuste derrière la nuque.

Garde

Il existe deux gardes distinctes : la garde directe et la garde croisée. Le cavalier est en garde directe lorsque, tenant son sabre de la main droite, son adversaire se trouve chevaucher à sa droite attaque de dos
Fig. 1
attaque de dos et parade de prime
haute, en garde mixte
ou bien lorsque, tenant son sabre de la main gauche, son adversaire se trouve chevaucher à sa gauche. Il est en garde croisée dans les cas inverses. La garde est dite mixte (fig. 1) quand l’un des deux adversaires est en garde directe et l’autre en garde croisée. L’arme doit toujours être tenue dans le prolongement du bras, la pointe dirigée vers la poitrine de l’adversaire, le haut du corps tourné de trois quarts vers lui. Le bras reste plié. En garde directe, la main qui tient l’arme est placée légèrement en tierce et celle qui tient les rênes se rapproche du corps pour s’abriter des coups. En garde croisée, la main qui tient l’arme passe par dessus l’autre et la protège.

Leçons à pied

L’élève qui n’aurait jamais fait de sabre à pied devra prendre de quatre à six leçons à pied avant de commencer l’apprentissage à cheval. Dans ce cas, le maître lui enseignera principalement les attaques et les parades applicables dans l’escrime équestre et visera surtout aux assouplissements de poignets. Ces leçons doivent, bien entendu, être prises des deux mains et en commençant par la gauche.

Attaques

Dans l’escrime équestre élémentaire, les coups de pointe doivent être proscrits. Les principales attaques sont : la tête, la figure à droite, la figure à gauche, le dos, les mains, cette dernière attaque se dirigeant de préférence sur la main qui tient les rênes. On peut faire précéder parfois les attaques de battements et de froissements mais il ne faut pas en abuser, surtout au début.

Parades

Les principales parades sont : la quarte et la tierce hautes, la quarte et la tierce basses, la prime à gauche et la prime à droite hautes et basses ; ces parades se font en opposition ; les contres, peu recommandables en assaut, servent surtout dans la leçon pour exercer le poignet.

Tableaux de travail

Les tableaux suivants ont été établis pour faciliter l’apprentissage en même temps que pour servir d’exemple ; ils groupent les principales attaques et parades dans l’ordre de leur difficulté.

attaque directe à la tête, riposte à la figure,
au dos ou à la main

1o A droite B gauche (garde directe). On suppose les deux cavaliers A et B chevauchant côte à côte et l’on sous-entend les mots : le cavalier (A) tient son sabre de la main (droite.), etc…

A attaque à la tête B pare et riposte figure à droite et figure à gauche ; A pare tierce et quarte hautes.
B pare et riposte dos et main ; A pare tierce et quarte basses ou prime.
B attaque à la tête A pare et riposte figure à gauche et figure à droite ; B pare tierce et quarte hautes.
B pare et riposte dos et main ; B pare tierce et quarte basses — ou primes.

2o A droite B droite (garde mixte) :

A attaque à la tête B pare et riposte fig. à gauche et fig. à droite ; A pare quarte et tierce hautes.
B pare et riposte main et dos ; A pare quarte et tierce basses ou prime.
B attaque à la tête A pare et riposte fig. à gauche et fig. à droite ; A pare quarte et tierce hautes — ou primes.
A pare et riposte dos et main ; B pare quarte et tierce basses — ou primes.

3o A gauche B droite (garde croisée) :

A attaque à la tête B pare et riposte fig. à gauche et fig. à droite ; A pare tierce et quarte hautes — ou primes.
B pare et riposte main et dos ; A pare tierce et quarte basses — ou primes.
B attaque à la tête A pare et riposte fig. à droite et fig. à gauche ; B pare tierce et quarte hautes — ou primes.
A pare et riposte main et dos ; B pare tierce et quarte basses — ou primes.

4o A gauche B gauche (garde mixte) :

A attaque à la tête B pare et riposte fig. à droite et fig. à gauche ; A pare quarte et tierce hautes — ou primes.
B pare et riposte dos et main ; A pare quarte et tierce basses — ou primes.
B attaque à la tête A pare et riposte fig. à droite et fig. à gauche ; B pare quarte et tierce hautes.
A pare et riposte main et dos ; B pare quarte et tierce basses ou prime.
feinte de figure, attaque main ou dos, parade et riposte

1o A droite B gauche (garde directe) :

A attaque Fig. à gauche et dos ; B pare tierce haute, tierce basse ou prime et riposte fig. à gauche ou tête.
Fig. à droite et main ; B pare quarte haute, quarte basse et riposte fig. à gauche.
B attaque Fig. à droite et dos ; A pare tierce haute, tierce basse ou prime et riposte fig. à droite ou tête.
Fig. à gauche et main ; A pare quarte haute, quarte basse et riposte fig. à droite.

2o A droite B droite (garde mixte) :

A attaque Fig. à gauche et dos ; B pare quarte haute, quarte basse — ou primes et riposte fig. à gauche ou tête.
Fig. à droite et main ; B pare tierce haute, tierce basse ou prime et riposte fig. à droite ou tête.
B attaque Fig. à droite et dos ; A pare tierce haute, tierce basse ou prime et riposte fig. à droite ou tête.
Fig. à gauche et main ; A pare quarte haute, quarte basse et riposte fig. à gauche.

3o A gauche B droite (garde croisée) :

A attaque Fig. à gauche et dos ; B pare quarte haute, quarte basse — ou primes et riposte fig. à gauche ou tête.
Fig. à droite et main ; B pare tierce haute, tierce basse ou prime et riposte fig. à droite ou tête.
B attaque Fig. à droite et dos ; A pare quarte haute, quarte basse — ou primes et riposte fig. à gauche ou tête.
Fig. à gauche et main ; A pare tierce haute, tierce basse ou prime et riposte fig. à droite ou tête.

4o A gauche B gauche (garde mixte) :

A attaque Fig. à gauche et dos ; B pare tierce haute, tierce basse ou prime et riposte fig. à droite ou tête.
Fig. à droite et main ; B pare quarte haute, quarte basse et riposte fig. à gauche.
B attaque Fig. à droite et dos ; A pare quarte haute, quarte basse — ou primes et riposte fig. à gauche ou tête.
Fig. à gauche et main ; A pare tierce haute, tierce basse ou prime et riposte fig. à droite.

Les mêmes exercices se répèteront ensuite avec une et plusieurs contre-ripostes de façon à allonger progressivement la phrase d’armes.

Travail du poignet

On travaillera surtout les poignets : 1o en répétant plusieurs fois de suite les différentes parades de primes. — 2o en parant par les contres des séries d’attaques à la main. — 3o en exécutant et en parant les coups suivants plusieurs fois de suite et de plus en plus vite : feinte à la main et à la figure, revenir à la main — feinte au dos et à la figure, revenir au dos.

Salut.

Le salut s’exécute, les deux cavaliers se faisant face, immobiles et tête nue et tenant le sabre de la main droite. Tous deux étendent alors le bras en avant de façon que l’arme passe droit au dessus des oreilles du cheval puis, se retournant en selle, ils l’étendent en arrière de façon que l’arme passe au dessus de la croupe. Après quoi, face à gauche, ils font le geste de parer la tête puis, face à droite, ils font le même geste mais le coude en avant et le poignet renversé ; enfin, se dressant sur les étriers, ils exécutent un moulinet rapide au dessus de la tête et, retombant en selle, se saluent en portant la poignée du sabre à la hauteur du menton et en l’abaissant lentement à droite jusqu’à ce que le bras soit complètement tendu et la pointe de l’arme dirigée vers le sol.

Changement de garde.

L’élève devra être exercé à de fréquents changements de garde. Le changement de garde doit s’opérer à propos et très rapidement. Le cavalier place le sabre entre les rênes et le pouce de la main qui les tient ; la main qui tenait le sabre, rendue libre, s’empare aussitôt des rênes et libère à son tour l’autre main.

Poursuite et corps à corps.

La poursuite et le corps à corps ne doivent intervenir qu’accidentellement parce qu’ils annihilent en somme le rôle de l’arme. La parade de poursuite est la parade de tierce, le bras tendu en arrière. Le corps à corps est une ressource dans le cas où l’on se trouve pressé par l’adversaire et à sa merci.

Rôle du cheval.

Le cavalier doit se borner au début à maintenir son cheval à l’allure choisie et à se maintenir lui-même en équilibre de façon à bien assurer la liberté de ses mouvements. Par la suite, il peut se servir de son cheval : 1o pour prendre, à un moment donné, quelques lignes d’avance ou de recul sur son adversaire s’il y trouve son avantage. — 2o pour se rapprocher ou s’écarter de lui. — 3o pour le bloquer, c’est-à-dire lui couper la route en biais à un moment propice. — 4o pour tourner autour de lui quand l’occasion s’en présente.


Boxe

Équipement.

La culotte et la chemise de flanelle suffisent ; ni veste ni masque bien entendu. Les gants ordinaires de boxe ne peuvent servir n’ayant pas les doigts séparés mais les gants qui ont servi au sabre conviennent. attaque de dos
Fig. 2
Attaque de tête, esquive
et riposte au flanc

Garde.

Il n’existe qu’une seule garde effective, la garde directe ; la garde croisée ne permettrait pas d’atteindre l’adversaire. Les changements de garde doivent donc être très fréquents. Il en résulte également que le rôle du cheval devient plus complexe, le cavalier ayant intérêt à chercher à « tourner » rapidement son adversaire.

Attaques, parades et esquives.

Les deux principales attaques sont la tête et le flanc ; on les pare avec le poing mais le mieux est de les esquiver ; l’esquive est la meilleure ressource défensive du boxeur à cheval (Fig. 2.)

Leçons à pied.

L’observation faite pour le sabre relativement au travail préalable à pied s’applique également à la boxe.