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PELLEAS AND MELISANDE.

AIÉLISANDE. Je vois une rose dans les ténèbles... Pelléas. Où donc?... Je ne vois que les branches du saule qui dépassent le mur... MÉLISANDE. Plus bas, plus bas, dans le jardin ; là-bas, dans le vert sombre. Pelléas. Ce n'est pas une rose... J'irai voir tout à l'heure, mais donne-moi ta main d'abord; d'abord ta main... IMélisande. Voilà, voilà;... je ne puis me pench- er davantage... Pelléas. Mes lèvres ne peuvent pas atteindre ta main... MÉLISANDE. Je ne puis pas me pencher davan- tage... Je suis sur le point de tomber... — Oh ! oh ! mes cheveux descendent de la tour!... (Sa chevelure se révulse tout à coup, tandis qu'elle se penche ainsi et inonde PelléasJ. Pelléas. Oh! oh! qu'est-ce que c'est?... Tes cheveux, tes cheveux descendent vers moi!... Toute ta chevelure, Mélisande. toute ta chevelure est tombée de la tour!... Je les tiens dans les mains, je les tiens dans ma bouche... Je les tiens dans les bras, je les mets autour de mon cou... Je n'ouvrirai plus les mains cette nuit... MÉLISANDE. Laisse-moi! laisse-moi!, me faire tomber!... Tu vas Pellé.s. Non, non, non ;.., je n'ai jamais vu de cheveux comme les tiens, IMéli- sande!... Vois, vois, vois, ils viennent de si haut et ils m'inondent jusqu'au cœur... Ils m'inondent encore jus- qu'aux genoux... Et ils sont doux, il.«* sont doux comme s'ils tombaient du ciel !... Je ne vois plus le ciel à travers tes cheveux. Tu vois, tu vois, mes mains ne peuvent plus les tenir.. Il y en a jusque sur les branches du saule... Ils vivent comme des oiseaux dans mes mains... et ils m'aiment, ils m'ai- ment mille fois mieux que toi ! IMÉLISANDE. Laisse-moi... laisse-moi... quelqu'ur, pourait venir... Pelléas. Non, non, non ; je ne te délivre pai cette nuit... Tu es ma prisonnière cette nuit ; toute la nuit, toute la nuit... IMÉLISANDE. Pelléas! Pelléas! Pelléas. Tu ne t'en iras plus... Je les noue, je les noue aux branches du saule, tes cheveux. Je ne soufifre plus au milieu de tes cheveux. Tu entends mes baisers le long de tes cheveux? Us montent le long de tes cheveux. Tl faut que chacun t'en apporte. Tu vois, tu vois, je puis ouvrir les mains... Tu vois, j'ai les mains libres et tu ne peux m'abaiidonner. .. (Des colombes sortent de la tour et volent autour d'eux dans la nuit.) IMÉLISANDE. Oh! oh! tu m'as fait mal... Qu'y a-t-il, Pelléas? — Qu'est-ce qui vole autour de moi? Pelléas. Ce sont les colombes qui sortent de la tour... Je les ai eiïrayées ; elles s'en volent.