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LETTER OF M. HÉGER TO MR. BRONTË.
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pas vous cacher que nous éprouvons à la fois et du chagrin et de l'inquiétude; nous sommes affligés parceque cette brusque séparation vient briser l'affection presque paternelle que nous leur avons vouée, et notre peine s'augmente à la vue de tant de travaux interrompees, de tant des choses bien commencées, et qui ne demandent que quelque temps encore pour être menées à bonne fin. Dans un an, chacune de vos demoiselles eût été entièrement prémunie contre les éventualités de l'avenir; chacune d'elles acquerrait à la fois et l'instruction et la science d'enseignement; Mlle. Emily allait apprendre le piano; recevoir les leçons du meilleur professeur que nous ayons en Belgique, et déjà elle avait elle-même de petites élèves; elle perdait donc à la fois un reste d'ignorance, et un reste plus gènant encore de timidité; Mlle. Charlotte commençait à donner des leçons en français, et d'acquerir cette assurance, cet aplomb si necessaire dans l'enseignement; encore un au tout au plus, et l'œuvre était achevée et bien achevée. Alors nous aurions pu, si cela vous eût convenu, offrir à mesdemoiselles vos filles ou du moins à l'une de deux une position qui eût été dans ses gouts, et qui lui eût donne cette douce indépendance si difficile à trouver pour une jeune personne. Ce n'est pas, croyez le bien monsieur, ce n'est pas ici pour nous une question d'interet personnel, c'est une question d'affection; vous me pardonnerez si nous vous parlons de vos enfants, si nous nous occupons de leur avenir, comme si elles faisaient partie de notre famille; leurs qualités personnelles, leur bon vouloir, leur zèle extrème sont les seules causes qui